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Terrenoire - III. Je Bois Tout Seul
Musique et vidéo : Terrenoire
Lundi 18 juin, 13h42, Alors c’est ça la Ville, la grande ? Tant de monde et pourtant, tellement de solitudes.
Il a fallu que nous prenions la route et que nous laissions une partie de nous en arrière, dans l’ombre. Elle est belle et dangereuse la Ville, avec sa gueule d’appel à la noyade. On pourrait s’imaginer qu’elle nous transforme. Qu’elle nous métamorphose. Qu’elle fait de nous des gens-plus-grands-qu’on-est.
Elle serait comme une seconde chance, la Ville. Un nouveau terrain pour y planter son rêve, son arbre d’ambitieux. Comme un moyen d’accéder à quelque chose qu’on ne pouvait atteindre. Oui, parce que de là où nous venons il n’y a rien qui ne nous aurait permis de nous accomplir. N’est-ce pas ?
D’où on vient, il y a des tas de maisons toutes pareilles. Avec des jolis jardins bien modestes, des gens identiques aux jardins. C’est tellement tranquille, qu’on croirait presque que c’est à l’abandon. Les cerisiers font des cerises, et les gens font des enfants qui montent sur des vélos. Ces enfants tournent partout et agrandissent leurs aires de jeux, chaque jour un peu plus, entre les forêts et les voitures qui brûlent.
Nous avons grandi à Terrenoire. Nous avons voulu, un jour, quitter cet endroit : les terrains de jeux, les forêts, le lotissement. Mais comme on ne quitte jamais son corps, nous sommes et resterons à jamais des enfants de Terrenoire , arrivés dans la Ville, la grande.
Là où, dans les rues pavées, les gens se croisent, s’ignorent ou se trouvent beaux. Là où on s’enivre avec ce qu’on peut, du mauvais Gin, de l’amour en poudre, les rêves d'un futur radieux. Nous errons joyeusement, nous et notre solitude. Comme des motards-assassins. Tandis que la ronde de notre propre ivresse s’enroule sur nous comme le périphérique sur la Ville, et fait brûler la nuit.
Toi je te reconnais, tu n’es qu’un parmi tant d’autres. Il n’y a que des vagabonds dans la Ville. Et toi tu en es un. C’est ce que nous sommes nous aussi, des vagabonds vers la lumière. Je te vois avancer, volontaire. Faire de ta Vie la quête d’un ailleurs qui te sauvera. Poètes-mercenaires. On se répète le credo. On prie pour la fortune. Gardons la beauté sauve.
Tout ce que nous avons à choisir, c’est la couleur de la boisson avec laquelle avancer. Quel sera le mélange pour dompter la ville ? Quelle sera la part d’ombre, la part de lumière ? De quoi nous délesterons nous pour passer un jour, le portail du Black Paradiso. Cramés, transfigurés, peut-être les deux ?
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