La Rhapsodie interrompue

La Rhapsodie interrompue pour violon, violoncelle et piano d'Adrien Daussy.

Créé en juillet 2022 par le trio Messiaen au festival les Forêts, ce trio peut être considéré comme étant de "première manière", comme le témoignage d'une étape de parcours dans la conquête du langage.

Reprise à l'Auditorium du Conservatoire de Lille en décembre 2022.

I : 00:00
II : 03:20
III : 06:33

Si le titre de la Rhapsodie interrompue se justifie par l'utilisation énergique et bartokienne de deux mélodies traditionnelles bretonnes, il est aussi une référence évidente au neuvième des douze préludes pour piano du premier cahier de Claude Debussy. Dans la Sérénade interrompue, le compositeur nous invite à suivre l'entrelacement de deux matériaux, le premier agité et dansant, le second en forme de habanera chaloupée, qui s'interrompent et injectent de la discontinuité dans le discours. Ce principe formel, ici à l'état embryonnaire, va m'intéresser en ce que mes deux thèmes une gwerz bretonne, al lezvamm, et un hanter-dro (une danse à trois temps) seront superposés et imperceptibles dans le premier mouvement, puis se couperont, s’interrompront, dans le deuxième et troisième mouvement. Ces deux mélodies ne seront pas perceptibles dans le premier mouvement, noyées dans la micropolyphonie, car plus qu'un clin d’œil attendri à Debussy c'est ici la synthèse des principes formels d'Henri Dutilleux avec ses jeux de préfigurations et de réminiscences, ainsi que des formes « kaléidoscopiques » de György Ligeti, où des petits éléments reviennent, perpétuellement transformés au travers du prisme des uns des autres. Car les thèmes, accords, motifs et objets sonores distillés au sein de la texture magmatique du premier mouvement verront dans les deux suivants leur épiphanie, leur dévoiement, leur réminiscence, leur variante, leur vestige. Si cette rhapsodie est une ode à la Bretagne, c'est également une page russophile, très imprégnée de l'expression musicale d'Alfred Schnittke.