Mercredi, 13 avril 1300, 6h matin
A peine j'entre au feu comme il me le commande,
Que pour me rafraichir, tant la flamme était grande,
Je me serais jeté dans du verre bouillant.
Lo dolce padre mio, per confortarmi,
pur di Beatrice ragionando andava,
dicendo: "Li occhi suoi già veder parmi".
Guidavaci una voce che cantava
di là; e noi, attenti pur a lei,
venimmo fuor là ove si montava.
’Venite, benedicti Patris mei’,
sonò dentro a un lume che lì era,
tal che mi vinse e guardar nol potei.
"Lo sol sen va", soggiunse, "e vien la sera;
non v’arrestate, ma studiate il passo,
mentre che l’occidente non si annera".
Sì ruminando e sì mirando in quelle,
mi prese il sonno; il sonno che sovente,
anzi che ’l fatto sia, sa le novelle.
Giovane e bella in sogno mi parea
donna vedere andar per una landa
cogliendo fiori; e cantando dicea:
"Sappia qualunque il mio nome dimanda
ch’i’ mi son Lia, e vo movendo intorno
le belle mani a farmi una ghirlanda.
Per piacermi a lo specchio, qui m’addorno;
ma mia suora Rachel mai non si smaga
dal suo miraglio, e siede tutto giorno.
Ell’è d’i suoi belli occhi veder vaga
com’io de l’addornarmi con le mani;
lei lo vedere, e me l’ovrare appaga".
À peine j’entre au feu comme il me le commande,
que pour me rafraîchir, tant la flamme était grande,
je me serais jeté dans du verre bouillant.
Pour m’aider à souffrir la flamme expiatrice,
le doux maître en marchant parlait de Béatrice,
disant : « Je crois déjà voir son bel oeil brillant. »
Une voix qui chantait nous guidait dans les flammes,
et, la suivant toujours, dehors nous arrivâmes
en face des degrés qui restaient à monter.
« Venez, venez, ô vous, les bénis de mon Père ! »
Ces mots retentissaient du sein d’une lumière
que mes yeux éblouis ne pouvaient supporter.
Elle ajoutait : « Le jour s’enfuit, la nuit avance,
ne vous arrêtez pas et faites diligence
avant que l’occident s’obscurcisse à son tour. »
Rêveur, je contemplais leur éclat fantastique.
Le sommeil me surprit, ce sommeil prophétique,
le messager souvent des choses qui seront.
Une dame je vis en rêve, jeune et belle,
qui s’en allait cueillant, légère pastourelle,
des fleurs dans la campagne, et chantait en chemin :
« Lia, voilà mon nom, si quelqu’un le demande
pour me tresser de fleurs une fraîche guirlande
je vais, de ci de là, tendant ma belle main.
Pour me trouver plus belle au miroir, je me pare.
Du sien ma sœur Rachel jamais ne se sépare
et reste tout le jour assise sans labeur.
Regarder ses beaux yeux, voilà tout ce qu’elle aime.
Moi j’aime de mes mains à me parer moi-même,
contempler est sa joie : agir est mon bonheur. »
Là, Virgile laissa Dante libre de faire désormais toute chose, sans plus demander conseil. Au sommet de la montagne du Purgatoire, les deux poètes s’avancèrent vers la forêt du Paradis terrestre. Le fleuve Léthé les arrêta. Dante vit alors dans la forêt une ardente lumière, et entendit dans l’air une mélodie suave ; puis ce fut une procession dans laquelle un Griffon traînait un char triomphal. Arrivé en face de Dante, le Griffon avec tout son cortège s’arrêta. Béatrice descendit du ciel et à sa vue, Virgile disparut.
D'après la "Divine Comédie" de Dante Alighieri (1265-1321)
Extrait du spectacle "Dante Troubadour : La Montagne du Purgatoire" réalisé le 19 octobre 2018 au Sémaphore, scène conventionnée de Cébazat (63).
Ensemble musical La Camera delle Lacrime (direction Bruno Bonhoure et Khaï-dong Luong) & Matthieu Dessertine.
Extraits musicaux issus du disque "PURGATORIO" (label "En Live") , avec :
Bruno Bonhoure : Direction musicale, voix, bombo legüero
Khaï-dong Luong : Conception artistique, écriture dramatique
Matthieu Dessertine : Comédien lecteur
Vivabiancaluna Biffi : Chant, vièle
Leah Stuttard : Chant, harpe
Pierre Hamon : Flûtes, tambour, cornemuse
Technique : Jean Bouther
Captation vidéo et réalisation : Kai Duc Luong et Heather Stone
Mixage et mastering audio : Alban Moraud
Prise de son : Aude Besnard
Lien d'achat et de téléchargement de l'album : https://www.lacameradellelacrime.com/...
www.lacameradellelacrime.com
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